Une histoire guidée par la passion… depuis 1934 !


Montée d’adrénaline

× 1970 : Snell’s Field et Super Gratton

Chamonix est devenue la capitale mondiale de la montagne et du ski. L’ENSA, où viennent se former tous les moniteurs de ski et tous les guides de France, est désormais installée dans les coupoles et les tours récemment sorties de terre. C’est aussi dans un nouveau bâtiment qui a poussé sur l’ancien mini-golf de la rue Paccard, que Snell Sports ouvre grand les portes de son nouveau magasin. Moderne, mais ne perdant rien de sa convivialité, il sert toujours de meeting point et de poste restante pour les nombreux grimpeurs étrangers de passage, encore plus nombreux. Mieux, on peut y grimper sur un mur de granite. C’est le premier mur d’escalade !

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C’est une époque où tout le monde veut ses Super Gratton... nouveau nom des chaussons EB (comme Edouard Bourdonneau, le maître bottier qui avait racheté le business de Pierre Allain) avec lesquels on s’attaque désormais aux grandes voies.

Liberté, légèreté, ivresse... Aux Etats-Unis, des communautés de grimpeurs vivent des mois entiers au Camp 4, un campground situé au pied des big walls du Yosemite. L’escalade est un mode de vie, une raison de voyager. A Chamonix, c’est au Snell’s Field qu’on se retrouve. Situé entre Chamonix et Les Praz, non loin de l’actuelle DZ du PGHM, le Snell’s Field, c’est un terrain qui appartient à la famille Snell, sur lequel se trouve un gros bloc (la toujours célèbre Pierre d’Orthaz), idéal pour bouldering (un 8A vient d’y être enchaîné). Les beatniks alpinistes grimpeurs peuvent y planter gratuitement leurs tentes, y garer leur 2CV ou leur combi VW. Ils s’y rencontrent, s’y aiment, s’y reposent, s’y entraînent, forment les cordées pour leurs grandes ascensions - en anglais langue officielle - et bien sûr y font la fête... Un peu trop. Si Donald avait tout su ! Et le si distingué Harold !?


× Du 34, 36 et des 3S

Ce n’est pas au Snell’s field, en tout cas, que s’installe Yasuo Kanda, au début des années 70. Comme ses compatriotes japonais qui déferlent en grand nombre à Chamonix à cette époque-là, il préfère le calme du camping des Rosières, et a toujours un truc à aller voir chez Snell où travaillent déjà Masalu et Torunagano, deux grimpeurs Japonais. Yasuo a de grands projets en montagne et souhaite vivre en France, à Chamonix si possible. Il passe d’abord tout un été à grimper.

Avec ses copains japonais, ils sont les premiers à déformer des lames des piolets en les chauffant pour leur donner plus d’angle. Et c’est avec ça qu’en mars 1972, ils réalisent une grande première hivernale aux Grandes Jorasses : le Couloir central ou ...couloir japonais.

Les grandes marques Simond et Charlet Moser s’inspireront de leur trouvaille. Yasuo repart travailler dans un restaurant japonais à Paris pour faire des économies et des progrès en français, revient à Cham, trouve un boulot dans un restaurant d’altitude, puis aux remontées mécaniques, fait le bûcheron dans le jardin de Donald en rêvant d’être engagé chez Snell, donne de temps en temps un coup de main au magasin et finalement, en 1981, obtient son premier contrat.


«A cette époque, 70% du chiffre d’affaire se faisait en été et... il y avait tellement de Japonais que je parlais ma langue toute la journée», se souvient Yasuo.

Une dizaine de bus arrivaient chaque jour de l’aéroport de Genève où s’était posé leur avion, parti de Tokyo. Yvette ne cessait de répéter à ses fournisseurs que non, il n’y avait pas d’erreur, il fallait bien une majorité de 35 à 37 en chaussures et de 34-36 en vêtements ! C’était aussi les années où il fallait un stock énorme de Cardis, la célébrissime veste que tout le monde s’arrachait, révolutionnaire, avec ses multicouches ! C’est aussi à cette époque que, débordant d’idées, comme à l’accoutumée, Donald réussit à convaincre ses confrères Sportalp et Sanglard de créer Cham 3 S, une entité qui fera la promotion des magasins de Chamonix et à l’étranger pour contrer ... le Vieux Campeur !

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× 80’s - 90’s : Fun, Fluo, Gore-tex®

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Harold disparaît en 1980. Olivier commence à épauler ses parents Donald et Yvette dans un air du temps qui se charge d’adrénaline. Si le fort accent américain du vieil Harold manque énormément, tout un lexique importé circule dans les rayons pleins de choses, de couleurs et de marques nouvelles... C’est aussi le temps d’Apocalypse snow, du  mono, des rides, du fun, du total look fluo, du top, les débuts du snow...

Le temps aussi d’Opéra vertical et de La vie au bout des doigts où Patrick Edlinger se laissent pendre, la main dans le sac de peuf, l’autre agrippée sur un graton, sur les falaises du Verdon.

Le mutant Blond devient la personnalité préférée des Français et provoque une véritable mutation de la pratique de l’escalade, entrainant dans son sillage de tout nouveaux pratiquants.

Beaucoup vont déferler vers les parois granitiques du massif du Mont-Blanc sur les traces de Monsieur de Mesmaeker, nom  de la première voie Piola, équipée à la manière des  falaises. L’époque est aux sensations fortes, aux shoots d’adrénaline et à l’extrême... Tout est possible, sans limites. Et, alors que tombe le mur de Berlin, changeant tous les équilibres du monde, apparaissent les murs d’escalade pour une pratique indoor (à l’heure où tout le monde a pourtant sa Gore-Tex®, terme entré dans le langage courant). Les SAE - structures artificielles d’escalade - vont faire de l’escalade un phénomène de société. 

Ça tombe bien, le premier mur de la vallée est justement dans la boutique. On s’y retrouve pour le fun.  

Marthe disparaît en 1993, Donald en 1994. En 1991, Olivier a épousé Corine, entrée comme employée quelques années auparavant, et le couple, troisième de l’histoire du magasin, est bien décidé à ne pas se reposer sur ses lauriers, à prendre des risques comme l’avaient fait Yvette et Donald, et avant eux Marthe et Harold. Ils commencent par « pousser les murs », à acheter à gauche et encore à gauche.... Empruntent beaucoup, pour investir encore.

The world is not enough... parfois se produisent de petits miracles, comme cette très grosse commande qui arrive d’un pays lointain, que Donald avait démarché pendant des années en envoyant catalogues et devis, ou comme cette production britannique, qui doit équiper des pieds à la tête et en tenue hivernale la centaine de personnes du tournage de James Bond... Le monde ne suffit pas.   

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